Les étiquettes
Fleur est douce.
Rose est une fonceuse.
Fleur est timide.
Rose a un sacré caractère.
Fleur est angoissée.
Rose nous mène par le bout du nez.
Fleur est très scolaire.
Rose a du mal à être sage à l'école.
Fleur écoute bien.
Rose est difficile.
Fleur est maladroite.
Rose nous teste.
Ces phrases nous les entendons tous les jours. Nous les prononçons parfois aussi.
Elles sont différentes c'est un fait. Depuis le début. Fleur était un bébé qui contemplait. Rose un bébé qui bougeait. Fleur est plus câline, Rose plus indépendante. Fleur attend notre accord, Rose se sert.
Elle sont différentes, certes. Mais ce qui change vraiment, c'est notre regard sur elles.
Quand Fleur est punie à l'école, chacun s'interroge : "mais que s'est-il passé pour qu'une enfant aussi sage fasse une bêtise?"
Quand Rose est punie à l'école, chacun renchérit : "Fallait s'y attendre. Elles vont rigoler les maîtresses avec elle!" (et concrètement depuis le début de l'année scolaire Rose n'a été désagréable à l'école que 2 fois, 2 fois que toute la famille rabache comme si c'était une enfant terrible dont les enseignants ne venaient pas à bout!)
Quand Fleur fait tomber un verre, nous levons les yeux au ciel "elle a deux mains gauches cette petite."
Quand Rose fait tomber un verre, nous la grondons "Arrête de faire des bêtises!".
Parfois je me demande si elles sont vraiment si différentes. Si la vraie différence ce n'est pas une différence d'étiquette.
Parce que Fleur était un bébé câlin et peu moteur (elle a commencé à s'asseoir à 9 mois), nous l'avons toujours considérée comme une petite fille douce et calme.
Parce que Rose était un bébé qui pleurait beaucoup, qui dormait peu, qui se déplaçait à 6 mois et montait sur les meubles à 9, nous l'avons toujours considérée comme une petite fille fonceuse et un peu difficile. Difficile pour qui me direz-vous? difficile pour nous, pour moi qui n'ait pas dormi une seule nuit complète en 2 ans et qui enchaîne encore rarement plus de trois nuits sans interruption. Difficile pour des parents trop fatigués pour être patients.
Elles sont différentes. Et nous sommes différents.
Elles sont uniques et c'est là l'essentiel.