De ce pays d'Afrique, je me souviens de la terre rouge, du rire des enfants, du riz au poisson, de l'huile de palme, des mangues bien mures.

Je me souviens aussi des chefs de famille qui lors des recensement indiquaient systématiquement 17 ans (âge légal au mariage) pour les filles de la famille promises voire déjà mariées (certaines n'étaient même pas formées).

Je me souviens de ces femmes à peu près de mon âge (23 ans à l'époque) qui listaient leurs 5 ou 6 grossesses et leurs enfants décédés sur les documents de recensement tout en me demandant pourquoi moi je n'avais pas de mari et d'enfants.

Pour avoir travaillé dans un pays africain, trop peu longtemps à mon goût mais de manière assez intense pour en avoir tiré une connaissance approfondie du milieu rural où j'étais, je n'ai pas une vision angélique de la vie des femmes africaines.

Et pourtant l'horreur me rattrape parfois. comme pour me dire que cela peut être pire.

il y a quelques jour, j'ai lu ça et je crois que ça se passe de commentaire.

Après cette lecture, j'avais deux solutions : vomir mes tripes et pleurer toutes les larmes de mon corps. (bordel de merde, des bébés, des fillettes!!!!) ou fermer la page et passer à autre chose.

Mais passer à autre chose ce n'est pas facile. Et puis je ne peux pas. Et puis j'ai ces mots transformées en images abjectes qui hantent mon esprit.

Bien sur je ne suis pas naïve, je ne découvre pas l'horreur, mais je ne peux pas m'y habituer (qui le peut?).

Et subitement j'ai repensé à ce que me disait un ami suite aux attentats de janvier et ma présence aux manif : "tu défends quelle liberté là? tu crois qu'on est libre? moi je suis sure qu'en Afrique ils ont rien, ils sont plus libres que nous".

Bon déjà le principe de l'Africain il a rien, mais il sourit et il est heureux, ça m'énerve.

Et puis j'ai des filles...et je sais qu'elle ont la chance d'être nées ici et pas là -bas. Pas au Congo, pas en Syrie, pas en Afghanistan, pas en Inde et pas dans tous ces pays où les hommes considèrent les femmes comme des objets (sexuels).

Puis vient la litanie des Et si?

Et si j'étais une maman congolaise, que pourrais-je faire pour sauver mes filles de ces barbares?

Et si j'étais une maman Afghane, à quel âge marierais-je ma fille?

Et si j'étais une maman syrienne, je fuirais ou je resterais?

Et je n'ai pas de réponse. Une seule certitude : j'ai eu de la chance. Elles ont eu de la chance de naître ici et maintenant.

Bien sur je peste contre les publicités sexistes, contre les jouets sexistes, contre les préjugés sur les femmes aux travail; bien sur que l'égalité n'est pas complètement acquise. Bien sur qu'il faut continuer à se battre pour une vraie égalité.

Chaque jour j'ai peur pour mes filles : pour leur avenir, pour leur scolarité, pour leur sécurité. Mais je sais que finalement ce sont de petites peurs.

je sais aussi que c'est en se battant ici et maintenant pour plus d'égalité que l'on peut faire changer l'image de la femme ailleurs. Je le crois. Je l'espère aussi.

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