Pourquoi j'ai du mal avec le blocage du 17 novembre

Tout d'abord que les choses soient claires : je ne suis pas un "bobo urbain qui roule en vélib" comme je peux l'entendre à chaque fois que j'exprime le fait que je suis contre les manifs du 17 novembre. 

Certes je vis en ville mais j'habite à 90km de mon travail, j'y vais en voiture car j'économise ainsi 3h de trajet/jours (2h30 l'aller en tram+train contre 1h en voiture). Moi aussi je paie mon essence plus chère (50€ le plein ce soir contre 40€ quand j'ai acheté ma voiture il y a 2 ans) et cette augmentation a un vrai impacte dans mon budget vu que je fais le plein 1 à 2 fois par semaine selon le nombre de jours de télétravail que j'arrive à avoir. Moi aussi je roule sur des départementales qui sont passées à 80km/h (et je n'ai toujours pas compris pourquoi c'était un problème), même si le plus gros de mon trajet se fait sur autoroute (et si on parlait des péages qui augmentent car on a libéralisé l'accès à l'autoroute?). 

Mais une fois que j'ai posé ce portrait de moi et de mes déplacements quotidiens, je le dis haut et fort : non je peux pas soutenir ce mouvement. 

J'aurais pourtant tant aimé que les citoyens se lèvent pour autre chose. 

Le code du travail? pff rien à faire. 

La suppression des postes de fonctionnaires? pff rien à faire

La casse du service de transport public? pff rien à faire. 

Des associations qui peinent à venir en aide aux plus démunis car on leur a retiré le seul dispositif qui leur permettait d'avoir des employés aux vues de leur petit budget? pff rien à faire

Le gouvernement qui piétine allègrement les promesses en matière d'écologie au point que le ministre de l’écologie démissionne? pff rien à faire

Les parkings des hôpitaux qui deviennent payant au profit de grosses sociétés privés? pff rien à faire

Mais surtout qu'on ne touche pas au prix de l'essence! qu'on ne limite pas la vitesse! La voiture c'est sacrée, c'est notre liberté! 

Il n'y aurait pas comme 30 ans de retard dans ce combat? On sait que le voiture est amenée à disparaître, que le diesel est responsable de milliers de morts. Mais égoïstement on s'en fiche parce que la voiture c'est la liberté. 

Je suis la première à prendre ma voiture tous les jours et pourtant je sais qu'il va falloir que je change de mode de vie, que je limite mes trajets en voiture aux trajets les plus longs, que je limite mon utilisation du pétrole qui deviendra bientôt si rare. Je le sais et je considère que taxer cette ressource sera le seul moyen de faire changer les habitudes (même si soyons clair, le prix actuellement de l'essence n'est pas dû aux taxes). Car nous n'avons plus le temps d'attendre. Un derniers rapport a montré que si la transition énergétique et écologique n'était pas entamée dans 2 ans, nous allions droit dans le mur. 2 ans...mon fils a à peine le temps d'apprendre à parler!

J'entends bien que derrière cette mobilisation, il y a plus que le prix de l'essence.  Il y a le mal être de la classe moyenne qui se dit que ses enfants vivront moins bien qu'eux même, il y a la peur de l'avenir, il y a un ras le bol d'une répartition inégale des richesses. Mais prendre le prix de l'essence comme point de départ rend le combat inaudible. L'essence DOIT devenir chère pour qu'on ne meurt pas tous étouffés par nos émissions de gaz à effets de serre. 

Moi aussi j'ai peur de l'avenir, moi aussi j'ai peur que mes enfants se retrouvent dans des situations difficiles. Mais croyez moi, cette peur ne vient pas de l'augmentation du prix de l'essence. Non ma peur vient de l'inaction des gouvernements et des populations face à un changement climatique qui va bientôt bouleverser tout ce que nous connaissons. Et quand je vois que ce qui fait bouger les gens c'est le prix de l'essence, je me dis qu'il va être compliqué d'inventer un autre monde, un monde qui permette de limiter le réchauffement climatique.  

Parce que oui, il y a des raisons de se lever et d'aller manifester :

Et si on demandait plutôt des transports public accessibles et réguliers? 

Et si on demandait plutôt une organisation du territoire moins focalisée sur les grandes villes afin toutes les régions aient des emplois et qu'on ne soient plus obligés de tous se diriger vers le même lieu chaque matin?

Et si on demandait plutôt une meilleure répartition des richesses? 

Et si on demandait une vraie transition énergétique qui nous permette de ne plus être dépendant des énergies fossiles? 

Et si on modifiait notre consommation pour préserver les richesses de notre planète? 

Et si on cessait de rêver du monde d'hier et qu'on imaginait le monde de demain? 

(et sinon, le 8 décembre, il y a des manifestations un peu partout en France pour le climat)

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